Les pays baltes : où révolution rime avec chanson
par Krystyna Wozniak, guide-accompagnatrice
Voyager c’est plonger dans la culture d’un pays. C’est regarder comment le passé a forgé la vie d’aujourd’hui, comment l’histoire a façonné l’humain. Voyages Lambert se donne comme mission de vous proposer des voyages où l’émotion culturelle est au cœur de ces découvertes. Les pays baltes ont vu défiler au fil des siècles une multitude d’influences étrangères. Malgré ces périodes tumultueuses, chaque nation balte a su préserver son identité culturelle unique. Au XXe siècle, après avoir brièvement goûté à l’indépendance entre les deux guerres mondiales, les pays baltes ont subi l’occupation soviétique pendant près de cinq décennies. Cette période sombre n’a fait qu’intensifier leur désir d’autodétermination.
La chute du communisme
Plusieurs révolutions sanglantes ont marqué l’histoire de différents pays, pour n’en citer que quelques-unes : la Révolution française (qui s’étendit jusque dans les colonies et qui, dans les mémoires comme dans les historiographies, passe pour être l’une des périodes les plus violentes de l’histoire de l’humanité); la Révolution américaine au XVIIIe siècle et la Révolution d’Octobre, aussi connue sous le nom de Révolution bolchévique, parfois sous le nom d’Octobre rouge.
Mais toutes les révolutions ne sont pas forcément sanglantes. Il y a quelques révolutions pacifiques qui ont réussi à changer le cours de l’Histoire sans effusion de sang et sans, ou très peu de victimes. Et c’est dommage qu’on n’en parle pas plus, dommage qu’on ne les mette pas sur le devant de la scène, pour montrer que la force n’est pas toujours le meilleur moyen pour arriver aux changement sociaux et politiques, que la violence n’est pas le seul chemin à prendre, et pour cause. Les Révolutions de 1989, également connue sous le nom de Chute du communisme, furent une vague révolutionnaire de mouvements démocratiques libéraux qui aboutit à l’effondrement de la plupart des gouvernements marxistes-léninistes du bloc de l’Est et d’autres parties du monde. Le mouvement de réforme qui a mis fin au communisme en Europe centrale et orientale a commencé en Pologne, avec la création de « Solidarnosc ». Il y a eu aussi la Révolution de Velours, qui s’est déroulé en Tchécoslovaquie du 16 novembre au 29 décembre 1989, précipitant la chute du régime du Parti communiste tchécoslovaque, dans la lignée de la chute des régimes communistes de l’Europe de l’Est.
La Révolution chantante
Mais qui a entendu parler de la Révolution chantante? Qui a entendu parler de la Voie balte, appelée aussi Le Chemin de la Liberté. Certainement très peu de gens. Ces évènements peu connus, mais tellement extraordinaires, ont contribué au processus de l’indépendance des pays baltes. Pour comprendre ces mouvements, il faut remonter à 1985, l’année d’arrivée au pouvoir de Mikhaïl Gorbatchev, et la mise en place de la perestroïka qui ouvre peu à peu des espaces d’expression en URSS.
Entre 1986 et 1991, plusieurs évènements ont eu lieu en Estonie, Lettonie et Lituanie. L’un de ces évènements marquants se déroula à Tallinn en 1988, dans l’immense amphithéâtre en plein air qui peut contenir jusqu’à 150 000 personnes, et qui accueille le Festival de chant choral estonien depuis 1869! Mais cette année-là, lors du festival, 300 000 Estoniens s’y retrouvèrent pour chanter et exiger l’indépendance, tout en chantant des hymnes patriotiques. Des manifestations nocturnes spontanées ont aussi eu lieu à cet endroit. L’expression « Révolution chantante » provient donc d’un article écrit par un artiste et militant estonien, publié après ces manifestations.
En 1990, 500 000 personnes assistèrent au Festival estonien de la chanson : 29 000 choristes ont chanté le répertoire traditionnel estonien sous le drapeau national pour la première fois depuis 50 ans. Ce fut le plus grand festival avant le retour à l’indépendance. De nos jours, environ 30 000 chanteurs et musiciens participent à cette fête devant un public de 200 000 personnes. Le Festival estonien de la chanson est classé au patrimoine immatériel de l’humanité par l’UNESCO.
La Voie balte
Dans le cadre de cette Révolution chantante, une autre manifestation non-violente a eu lieu. Une manifestation simultanée dans les trois pays baltes : Lituanie, Lettonie et Estonie. Et quelle manifestation! Mais pour mieux comprendre, il faut encore une fois reculer, cette fois-ci au 23 août 1939, jour de la signature du Pacte germano-soviétique ou Pacte Ribbentrop-Molotov, un accord diplomatique signé à Moscou par les ministres des Affaires étrangères : Ribbentrop pour l’Allemagne nazie et Molotov pour l’Union soviétique, en présence de Joseph Staline.
Outre un engagement de neutralité en cas de conflit entre l’une des deux parties et les puissances occidentales, le Pacte germano-soviétique comportait un protocole secret, qui délimitait pour chaque signataire une sphère d’influence et dont la mise en œuvre se traduira par l’invasion conjointe, l’occupation et l’annexion de certains États ou territoires (Pologne, Finlande, pays bales, Bessarabie). L’Allemagne se voit attribuer l’ouest de la Pologne, tandis que l’Union soviétique prend le contrôle de la partie orientale du pays. En outre, les États baltes, donc l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie, ont été placés dans la sphère d’influence soviétique, de même que la Finlande et certaines parties de la Roumanie.
Le jour du cinquantenaire de cet odieux pacte, le 23 août 1989, une action spectaculaire va symboliser la solidarité des trois pays face à l’occupant. Plus de deux millions de personnes, soit environ le tiers de la population d’Estoniens, de Lettons et de Lituaniens, se tenant par la main, ont formé une chaîne humaine de 687 km de long, allant de Vilnius à Tallinn, en passant par Riga, pour demander l’indépendance des pays baltes de l’URSS. Elle exprimait également la condamnation du passé et l’espoir en l’avenir. Une chanson écrite en 1989, intitulée « Les pays baltes se réveillent », dont les paroles ont accompagné la formation de « La Voie balte », est un chant principal de cette révolution non violente, un chant politique écrit en plusieurs langues et par plusieurs auteurs, et est désormais considéré comme l’hymne des pays baltes, même s’il n’a aucune reconnaissance officielle. Cependant, « La Voie balte » est inscrite au registre Mémoire du monde de l’UNESCO depuis 2009.
Malheureusement nous vivons dans un monde, où la violence, l’intolérance et la haine prennent de plus en plus de place. Prenons donc exemple de tous ces mouvements pacifiques, et ces révolutions non violentes qui prouvent que la force et l’effusion de sang ne sont pas toujours les meilleures façons pour arriver aux changements majeurs. Les exemples ci-haut mentionnés peuvent nous donner espoir en l’avenir et le désir de laisser au futures générations un monde meilleur!
Et pour terminer : La Voie balte, cette immense chaîne humaine, a débuté en Lituanie, sur la place de la cathédrale à Vilnius. Une plaque commémorative avec l’inscription « stebuklas » a été posée à l’endroit même où tout a commencé. Mais que veut dire « stebuklas » en lituanien? Je vous invite à venir trouver la réponse lors de notre circuit dans Les pays baltes, un circuit inédit qui vous plongera au cœur de l’histoire inspirante de ces trois pays et dont les peuples sont des plus accueillants.
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