Trelleborg, trésor UNESCO du Danemark

par Jean Louis Fabaron, guide-accompagnateur

Au Danemark, une forteresse viking est en passe de devenir une destination touristique incontournable. Récemment inscrit au patrimoine de l’UNESCO, le site de Trelleborg attire de plus en plus de visiteurs chaque année et il est en train de devenir un incontournable d’un voyage au Danemark. C’est un lieu dont Voyages Lambert avait compris tout l’intérêt bien avant ce coup de projecteur accordé par l’industrie du tourisme et c’est pour cela qu’il est intégré dans notre programme de visites du circuit Allemagne du Nord et Danemark, parfums d’histoire entre mers du Nord et Baltique, un circuit unique et inédit concocté avec soins par nos experts en voyage.

On dit de Trelleborg que c’est un endroit unique, au même titre que les pyramides d’Égypte ou la muraille de Chine. Le site de Trelleborg, avec son imposant diamètre et les vestiges de ses maisons longues, est le plus important des cinq forteresses circulaires que l’on peut voir au Danemark. Même si pour l’instant cette curieuse arène dans laquelle pénètrent les visiteurs ne paye pas de mine elle prouve encore une fois que les Vikings n’étaient pas seulement de sanguinaires guerriers mais aussi un peuple raffiné capable d’ouvrages architecturaux élaborés.

Situation géographique et description

La forteresse de Trelleborg est située sur le territoire de la commune de Slagelse, au nord- ouest de l’île de Sjaelland. Entourée de deux cours d’eau elle se trouve environ à 5 kilomètres du centre du village actuel. Il s’agit d’une immense enceinte circulaire de terres gazonnées entourant ce qui semble être un vaste champ symétriquement partagé. Elle est désormais considérée comme la forteresse circulaire viking la mieux conservée connue à ce jour. Cette construction, entièrement géométrique, à l’époque de son édification, était stratégiquement placée, idéalement située pour quiconque aurait souhaité contrôler le trafic maritime sur le Grand Belt entre l’île de Fionie et l’île de Seeland.

Ses remparts font 17 mètres de large sur 5 mètres de haut. Le diamètre intérieur est de 137 mètres. Ce cercle est divisé en quatre sections égales par deux chemins à angle droit, qui aboutissent à quatre portes opposées orientées aux quatre points cardinaux. On sait qu’elle fut construite à la hâte aux alentours de 980, vraisemblablement pour contrer une éventuelle attaque du Saint-Empire romain germanique selon la plupart des spécialistes mais d’autres soutiennent l’hypothèse qu’elle faisait partie du réseau militaire qui participa aux grandes attaques menées par les Vikings contre l’Angleterre à partir de 987. Nous allons y revenir plus loin.

Contexte archéologique

Trelleborg fut la première des cinq forteresses que compte le Danemark à avoir été découverte, quand un club local de motards en 1933 voulut utiliser les beaux remparts pour créer une piste de course. Bien entendu, leur projet n’a jamais pu se concrétiser. Lorsque les premiers archéologues ont commencé leurs investigations, leurs découvertes ont rapidement suggéré que le site était très spécial, bien qu’inconnu dans les sources écrites.

De nombreuses pointes de flèches dans les remparts et du bois carbonisé ont alors révélé qu’il s’agissait d’un ouvrage de défense d’un genre particulier, qui avait apparemment subi des assauts. À Trelleborg, plusieurs signes – au-delà des pointes de flèches – indiquent qu’il y a eu des luttes. Entre autres choses, un bouclier très bien conservé a été retrouvé dans un fossé ainsi que trois fosses communes avec des ossements de jeunes hommes bien entraînés, présentant des traces de coups, qui furent apparemment enterrés à la hâte. Le bouclier dans le fossé a été fabriqué à partir de bois provenant de l’ouest de la Norvège, et cela correspond plutôt bien avec le fait qu’environ la moitié des morts trouvés dans les trois fosses sont originaires d’Europe de l’Est ou de Norvège. Toutefois, il est impossible de dire si le bouclier trouvé dans le fossé de Trelleborg a été porté par un Norvégien avant qu’il ne finisse là.

Par ailleurs, d’autres fosses communes ont été découvertes dans la région ainsi que des sépultures dans lesquelles les morts furent inhumés tantôt selon les rites chrétiens, tantôt selon les anciennes coutumes nordiques. De nombreuses et belles découvertes ont été faites en lien avec ces dernières, notamment de superbes armes et certaines des premières pièces de monnaie danoises. Ce n’est qu’en 1979 que le bois permit de dater exactement le lieu. Les arbres ayant servi à la construction de l’édifice ont en effet été abattus pendant l’été de 980, donc sous le règne de Harald Gormsson dit « à la Dent bleue ».

Contexte historique

Harald à la dent bleue est célèbre pour avoir, à la fin du Xe siècle, christianisé les pays scandinaves qui avaient alors des frontières très malléables. Il est mondialement connu aussi pour, des siècles plus tard, avoir donné son nom à la technologie Bluetooth!

Sa dent était-elle cariée ou teintée par les myrtilles? On ignore pourquoi ce roi est entré dans l’histoire sous ce surnom saugrenu. Néanmoins ce personnage historique reste relativement méconnu hors du Danemark. De ce souverain on ne sait presque rien, ni à quoi il ressemblait, ni où il est enterré. On sait tout juste qu’il est né autour des années 920, qu’il a succédé à son père vers 958, que son fils, Sven à la barbe fourchue, l’a contraint à l’exil et qu’il s’est éteint vers 980. Détail cocasse : c’est une flèche ennemie plantée dans son postérieur qui causa, dit-on, son trépas! Triste fin pour un roi viking, censé périr les armes à la main pour rejoindre le Valhalla!

Il sera donc roi du Danemark à partir de 958 et roi de Norvège à partir de 970. On sait que son règne a imprimé des changements profonds en terre scandinave, car Harald fut l’artisan de l’unification du royaume des Danois et il fut également le roi qui convertit ce peuple au christianisme. Un prêtre, dénommé Poppon, aurait inspiré cette conversion collective aux alentours de 965 en empoignant une grande massue de fer chauffé à blanc sans souffrir de la moindre brûlure. Époustouflé, Harald aurait alors décidé d’embrasser le Dieu unique. Une grande pierre, érigée au village de Jelling (que l’on peut aussi admirer dans le même programme du circuit Allemagne du Nord et Danemark) sera commanditée par le roi lui-même, commémorant ce tournant historique. Voici d’ailleurs la traduction des runes que l’on peut y lire : « Le roi Harald ordonna que ce monument fût fait en mémoire de Gorm, son père, et de Thyra, sa mère, ce Harald qui gagna pour lui tout le Danemark et la Norvège et rendit chrétiens les Danois. »

 

 

En rapport avec cet évènement il faut préciser qu’à cette époque le Danemark vivait sous la menace d’un « géant » qui prospérait de l’autre côté de sa frontière sud : le futur Saint-Empire romain germanique appelé alors Empire Ottonien. Depuis plusieurs années, sous couvert d’évangélisation, le roi de Germanie, Otton Ier ambitionnait de faire main basse sur les marches septentrionales de son immense territoire. En 962, son accession au trône impérial a sonné l’alarme pour les Danois. La conversion du petit royaume du Nord, trois années seulement après le sacre de l’Empereur, « privait » ce dernier d’un prétexte de conquête. Le baptême d’Harald n’a pas pour seul mérite de couper l’herbe sous les pieds d’Otton Ier, il permet aussi au Danemark d’entrer de plain-pied dans le monde occidental. Ce sera la pénétration en terres danoises d’idées, de croyances, de pratiques et de savoir-faire venus du sud. Peu de domaines échapperont à cette influence. Sur le plan économique, Harald fait émettre des pièces de monnaies « chrétiennes » à valeur unitaire fixe, alors qu’auparavant seul le poids de métal précieux importait. Plus audacieux encore, au sein de ces sociétés adeptes du raid et du pillage, le monarque s’inspire d’un procédé « révolutionnaire » pour renflouer la trésorerie : la taxation des marchandises. Mais c’est surtout dans le domaine politique qu’il sait se montrer novateur. Tournant le dos à l’ordre traditionnel fondé sur les chefs de clan, Harald, souverain unique « élu » par le Dieu unique, se place au-dessus des roitelets païens. Ce modèle politico-religieux importé de l’Occident chrétien sera introduit dans la douleur en Norvège et en Suède. Au Danemark, le processus fut à la fois plus précoce et plus serein. Par son action et les liens qu’il entretint avec l’empire ottonien, Harald à la dent bleue et le Danemark intégrèrent pleinement un monde européen alors engagé dans une période de transition majeure. Pour reprendre des termes tout à fait actuels on peut dire qu’Harald à la dent bleue apparaît aujourd’hui encore comme le symbole d’une société de plus en plus connectée.

Comment Harald a inspiré… le Bluetooth?

En 1996, l’Américain Jim Kardach et le Suédois Sven Matisson, ingénieurs respectivement chez Intel et Ericsson, travaillaient sur un grand projet permettant de connecter différents appareils au sein d’un même réseau. Dans un pub, ils discutaient de leur passion commune : les Vikings. En découvrant le personnage de Harald à la dent bleue (blue tooth en anglais), l’Américain eut le déclic : le souverain du Xe siècle était parvenu à unifier des clans supposés inconciliables, et la technologie du XXIe siècle, elle, allait relier des appareils réputés incompatibles.

« Bluetooth j’ai pensé que ça ferait un nom de code génial pour le programme, expliqua plus tard Jim Kardach. J’ai alors préparé un Powerpoint avec un visuel de la pierre runique, où le roi Harald tient un téléphone dans sa main et un ordinateur dans l’autre. » Autre coup de génie marketing : le célèbre logo, combine les initiales du souverain danois en alphabet runique, l’antique système d’écriture des Vikings.

Pour en revenir à Trelleborg

Cette Europe chrétienne, le roi à la dent bleue s’en inspire autant qu’il s’en méfie. En effet c’est peu après sa conversion que le souverain danois entreprend de consolider le complexe de fortifications protégeant sa frontière sud avec l’Empire ottonien. La construction de cette ligne de démarcation entre les Danois et les Germains, autrement dit, entre les païens et les chrétiens, avait cela dit déjà débuté un siècle avant. Vers 960, Harald y ajoute d’impressionnants remparts, ainsi que tout un réseau de forteresses circulaires dont Trelleborg est, nous le disions, l’exemplaire le mieux conservé.

Ce réseau de défense démontre donc de façon magistrale l’existence d’une autorité royale forte qui fut capable, grâce à des opérations militaires et à la formation d’alliances, de mobiliser des ressources suffisantes pour exercer un contrôle souverain sur les eaux territoriales, le transport terrestre et le commerce. Ces forteresses, où vivaient des soldats, selon les estimations jusqu’à 1 300, et leurs familles, seront abandonnées après une vingtaine d’années. C’est d’ailleurs ce qui arriva à beaucoup d’installations militaires à travers le temps : elles semblent une bonne idée, leur construction parait même relever de l’urgence à un moment donné puis les choses changent et d’un coup, elles ne servent plus à rien.

Le futur de Trelleborg

L’idée de reconstituer certaines parties de Trelleborg hante depuis longtemps les esprits, mais c’est seulement depuis quelques années que l’intérêt pour les Vikings danois s’est considérablement accru. Ajoutons à cela un effet induit par les séries télévisées comme Vikings ou Game of Thrones. Ainsi, le nombre de visiteurs le prouve car il a presque triplé, passant de 29 000 à 75 000 en dix ans. Il est évident que les gens sont de plus en plus nombreux à vouloir en savoir plus sur les Vikings.

Bientôt, les visiteurs de la forteresse viking de Trelleborg pourront vivre la même expérience que les visiteurs des années 980. Des fortifications extérieures, un fossé profond, une palissade de 8 mètres de haut, construite sur un imposant talus de terre presque vertical. Cela devait être – et sera – impressionnant! On peut désormais rentrer à l’intérieur de la forteresse et remarquer l’emplacement des maisons. On apprend comment les gens menaient leur vie dans le passé, à quoi ressemblait leur quotidien et comment la société a évolué. Et si certains ont du mal à se projeter, maquettes et illustrations présentent le site tel qu’il était avant de tomber dans l’oubli.

Le musée national du Danemark, qui l’entretient, a prévu de reconstituer l’un des remparts et trois maisons allongées pour mieux permettre aux visiteurs de s’imprégner du lieu. Pour cela un don récent de la Fondation Augustinus d’un montant total de 15 millions de couronnes suédoises (soit presque 2 millions de dollars canadiens) a permis de lancer les travaux de restauration d’environ un quart de la forteresse pour commencer. Des fouilles avaient déjà été effectuées en 2016, précisément dans la zone où une partie de la forteresse va être reconstruite. C’est la première fois au monde que l’on va commencer à recréer une telle forteresse et cela devrait permettre d’éclairer le public sur la complexité de l’époque et réévaluer l’image des guerriers nordiques qui sont de plus en plus éloignés de l’image de maraudeurs primitifs qui leur colle à la peau.

Il est prévu de recréer une porte et 15 mètres de fortifications de chaque côté, afin d’illustrer l’étendue des ouvrages de défense. Au pied des palissades, un fossé d’un mètre de profondeur sera creusé et un pont en bois sera construit pour l’enjamber jusqu’à la porte. L’idée est de créer un espace à l’intérieur du rempart et que les installations extérieures puissent servir pour des activités telles que des exercices visant à prendre d’assaut la forteresse. Un projet ultérieur pour Trelleborg consistera à rebâtir également deux des maisons qui se trouvaient derrière les ouvrages de défense de la forteresse. Cependant, la somme d’argent nécessaire à cette réalisation n’est pas encore garantie

En conclusion

Trelleborg est une partie importante de l’histoire de la création du Danemark en tant que nation. Un patrimoine culturel dont les Danois peuvent être fiers, ceci d’autant plus que leurs ancêtres ont joué un rôle majeur et perceptible dans le monde entier. Ce monde fascinant des Vikings est celui que nous vous invitons à découvrir à travers tous nos circuits dans le grand domaine scandinave : le « Grand Tour de Scandinavie », « Helsinki, Stockholm, Oslo et Copenhague », « Islande, de feu et de glace ». En revanche, le seul qui vous permettra de vous immerger à Trelleborg est notre circuit inédit « Allemagne du Nord et Danemark, parfums d’histoire entre mers du Nord et Baltique ». C’est un rendez-vous pour tous les amoureux de l’histoire.

 

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